Ne vendez pas un produit aux clients mais une expérience
Article paru suite à ma conférence chez ING - La semaine de l'entrepreneur en Avril 2016.
Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi tel ou tel client ne revenait jamais, bien qu’il ait semblé plutôt satisfait ? Ou peut- être avez-vous déjà vous-même quitté un magasin alors que vous aviez la ferme intention d’y acheter quelque chose ?
« Il y a de fortes chances que l’expérience client n’était pas satisfaisante », explique Laurent Bouty, Academic Director de la Solvay Brussels School of Economics and Management (SBS-EM-ULB). La différence entre vos produits et ceux de vos concurrents réside sans doute dans la manière dont votre marque est ressentie. Les expériences vécues par le client sont primordiales, mais le problème est que cette expérience est différente pour chacun. Pensez, par exemple, à la question du prix. Être plus cher que la concurrence n’est pas un problème en soi, à la condition que l’on puisse offrir au client une expérience agréable ou stimulante. Pourquoi certaines marques sont-elles devenues incontournables ? Parce qu’elles vendent en premier lieu des émotions. Et ces émotions deviennent la marque. Dans le cas de Harley Davidson, les gens n’achètent pas un moyen de transport, mais un ticket d’accès à un groupe qui aime l’aventure. Et pour appartenir encore davantage au groupe, il faut acheter en plus de la moto, les vêtements et les accessoires adéquats. Nike ne vend pas des chaussures de course, mais une expérience complète de running. Évidemment, il faut donner au consommateur ce qu’on prétend lui donner. Le produit doit être bon, il n’y a rien de pire qu’un bon marketing pour un mauvais produit. C’est la garantie de ne jamais revoir le client.
Quatre moments de vérité
La bonne nouvelle est qu’en tant que marque, vous avez le contrôle sur ce processus, en jouant sur quatre moments clés : en premier lieu, le consommateur doit avoir conscience que la marque existe (Awareness). Les clients font leurs recherches, en surfant sur l’Internet, en posant des questions à leurs amis. Le mode de recherche varie de produit à produit, de marque à marque. Pour un voyage, les gens s’informent différemment que pour de l’électronique, les marques doivent y réfléchir. Ensuite arrive le moment où le consommateur envisage d’acheter chez vous (Consideration) et puis vient l’acte d’achat en tant que tel (Purchasing). Votre client téléphone et tombe sur une téléphoniste mal lunée ? Ou il entre dans le magasin et a le sentiment que personne ne lui prête attention ?
Ce sont deux occasions manquées ! Enfin, il y a l’expérience du consommateur avec votre produit (Experiences). Si cette expérience est positive, il aura tendance à vouloir la partager sur Facebook. Ou réaliser une petite vidéo explicative. Ou mieux encore, envisager d’acheter des accessoires. Il est donc très important de bien aborder ces quatre moments et de proposer du « contenu » pour ces moments. Du contenu qui correspond à ce que représente la marque et en reflète les valeurs. Pourtant, ce qu’exprime la marque elle-même n’est pas le plus important. Ce qui compte, c’est ce que le client en dit. N’hésitez donc pas à demander au client ce qu’il a pensé d’un produit ou service. Il n’est pas nécessaire de faire de longues enquêtes, une ou deux questions su sent. Ou demandez seulement d’attribuer un score et de l’expliquer en quelques mots.
Être plus cher que la concurrence n’est pas un problème en soi, à la condition que l’on puisse offrir au client une expérience agréable ou stimulante. Professeur Laurent Bouty - ULB
Une offre réduite mais plus claire
Les clients, qu’ils soient des particuliers ou des entreprises, sont assommés d’informations. Il y a 20 milliards de sites web dans le monde, soit trois fois plus que d’humains sur terre. Et plus chacun hurle pour di user son information gratuitement, plus chacun ferme ses oreilles pour surtout ne rien entendre. Sauf si cela les intéresse très fort bien sûr. Nous avons par conséquent évolué vers une économie où l’attention est devenue une den- rée rare. Et que constatons-nous ? L’attention se dirige vers les entreprises et les marques qui parviennent à garder les choses simples et cohérentes. Ce n’est pas Carrefour qui s’en sort le mieux, mais Colruyt. Chez Colruyt, les choses sont simples. Dès qu’il entre dans le magasin, le client comprend qu’il ne paie pas pour l’esthétique du bâtiment, car l’entreprise a investi son argent ailleurs. Mais le meilleur exemple reste toutefois Apple : leur gamme est réduite et, dès lors, facile à comprendre. VOO également veut apporter de la simplicité à ses clients et a décidé de réduire son offre. Alexandra Guillot (@aguillot), Manager Brand & Sponsoring : « Nous nous distinguons de la concurrence avec une offre limitée à trois formules. En outre, nous nous adressons clairement à la famille d’aujourd’hui. La famille moderne est flexible et évolue en permanence, nous et nos formules aussi. Nous prêtons, par ailleurs, beaucoup d’attention à notre engagement en faveur d’un service après-vente de qualité. Le client sait que nous sommes là pour lui. Une fois que le contrat est signé, le client n’est pas abandonné à son sort. »
Connaissez votre client
Bien connaître le client est effectivement le principe de base de toute marque. C’est la seule façon d’anticiper les attentes du client. Il est donc vital qu’une entreprise se pose les bonnes questions : qui sont mes clients ? Quel est mon terrain d’action ? Qui sont mes concurrents ? Comment vais-je faire la différence ? Et de la réponse à ces questions découle tout le reste. Le fait que ce ne soit pas toujours si simple ressort du témoignage d’Alexandre Helson, Business Developer de la Maison Dandoy, à Bruxelles : « Notre public s’étend des écoliers, qui viennent acheter quelques biscuits, aux grands-mères qui n’achètent qu’un grand spéculoos pour la Saint-Nicolas.
Le dénominateur commun, c’est qu’ils aiment tous les biscuits. Grâce à notre campagne de rebranding, nous avons toutefois réussi à rajeunir notre image, même s’il y a encore du pain sur la planche pour accroître notre notoriété. Actuellement, nous sommes quasiment plus connus à Paris qu’en Flandre ou en Wallonie. À proprement parler, nous sommes les spécialistes des biscuits. Pour notre rebranding, nous avons fait appel à des professionnels externes. Nous avons dû nous habituer à leurs idées, mais quelques années plus tard, nous sommes fiers de ce travail en commun. »
Soyez inventif
Aujourd’hui, peu d’entrepreneurs ont un budget suffisant que pour faire impression avec de grandes campagnes publicitaires. Les entreprises doivent donc être créatives et mettre en œuvre des moyens digitaux pour attirer l’attention de leur public. Elles font ainsi en sorte que leurs clients fassent eux-mêmes la promotion de la marque. Pensez, par exemple, à Facebook, Instagram, les blogs, les lettres d’information, les concours et un service après-vente rapide et efficace. Alexandre Helson : « Nous disposons à peine d’un budget marketing. En tant que « créateur d’émotions », nous misons sur l’humour, par exemple sur notre page Facebook. Et parfois, on attire l’attention de façon involontaire, comme lors de notre dernière campagne pour la Saint-Valentin. Ce furent pour Dandoy et moi-même des semaines très intenses, mais nous osons espérer que notre notoriété en a bénéficié.